Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année IX — Septembre 1866.

(Langue portugaise)

LES PHÉNOMÈNES APOCRYPHES.

1. — Le fait suivant est rapporté par l’Événement du 2 août 1866 :

« Depuis plusieurs jours, les habitants du quartier avoisinant l’église Saint-Médard  †  étaient mis en grand émoi par un fait singulier, mystérieux, qui donnait lieu aux commentaires et aux récits les plus lugubres.

« Des démolitions se font autour de cette église ; la plupart des maisons abattues ont été élevées sur l’emplacement d’un cimetière auquel se rattache l’histoire des prétendus miracles qui, au commencement du dix-huitième siècle, motivèrent une ordonnance du gouvernement qui ordonna, le 27 janvier 1733, la fermeture de ce cimetière, sur la porte duquel on trouva le lendemain l’épigramme suivante :

De par le roi… défense à Dieu

De faire miracle en ce lieu.

« Or, les maisons respectées par le marteau du démolisseur étaient, chaque nuit, ravagées par une grêle de pierres, souvent très grosses, qui brisaient les vitres des fenêtres et tombaient sur les toitures, qu’elles dégradaient.

« Malgré les plus actives recherches, nul ne put découvrir d’où provenaient ces projectiles.

« On ne manqua pas de dire que les morts du cimetière, troublés dans leur repos par les démolitions, manifestaient ainsi leur mécontentement. Mais des gens moins crédules, pensant bien que ces pierres qui continuaient à tomber toutes les nuits étaient lancées par un être vivant, allèrent réclamer l’intervention de M. Cazeaux, commissaire de police, qui fit organiser une surveillance par des agents.

« Pendant qu’ils l’exerçaient, les pierres n’apparurent pas, mais dès qu’ils la cessèrent, elles retombèrent plus abondantes encore.

« On ne savait que faire pour pénétrer ce mystère, lorsque la dame X…, propriétaire d’une maison de la rue Censier, vint déclarer au commissaire qu’effrayée parce qui se passait, elle avait été consulter une somnambule.

« Elle m’a révélé, dit la déclarante, que les pierres étaient lancées par une jeune fille affectée d’un mal à la tête. Précisément ma bonne, Félicie F…, âgée de seize ans, est atteinte de dartres sur cette partie du corps.

« Bien que n’attachant aucune importance à cette indication, le commissaire consentit cependant à interroger Félicie, et il en obtint des aveux complets. Agissant sous l’inspiration d’un Esprit qui lui est apparu, elle avait depuis plusieurs mois amassé dans un grenier une quantité considérable de pierres, et, chaque nuit, elle se levait pour en jeter une partie — par la fenêtre de ce grenier — sur les maisons voisines.

« Dans la présomption que cette fille pouvait être aliénée, le commissaire l’a envoyée à la Préfecture, pour qu’elle y soit examinée par des médecins spéciaux. »


2. — Ce fait prouve qu’il faut se garder d’attribuer à une cause occulte tous les faits de ce genre, et que, lorsqu’une cause matérielle existe, on arrive toujours à la découvrir, ce qui ne prouve rien contre la possibilité d’une autre origine dans certains cas dont on ne peut juger que par l’ensemble des circonstances, comme à Poitiers. A moins que la cause occulte ne soit démontrée par l’évidence, le doute est le parti le plus sage ; il convient donc de se tenir sur la réserve. Il faut se défier surtout des pièges tendus par la malveillance en vue de se donner le plaisir de mystifier les Spirites. L’idée fixe de la plupart des antagonistes est que le Spiritisme est tout entier dans les effets physiques, et ne peut vivre sans cela ; que la foi des Spirites n’a pas d’autre objet : c’est pourquoi ils s’imaginent le tuer en discréditant ces effets, soit qu’ils les fassent simuler, soit qu’ils en inventent dans des conditions ridicules. Leur ignorance du Spiritisme fait que, sans s’en apercevoir, ils frappent à côté de la question capitale qui est le point de vue moral et philosophique.

Quelques-uns, cependant, connaissent très bien ce côté de la doctrine ; mais comme il est inattaquable, ils se rejettent sur l’autre, plus vulnérable, et qui se prête plus facilement à la supercherie. Ils voudraient à tout prix faire passer les Spirites pour des admirateurs crédules et superstitieux du fantastique, acceptant tout les yeux fermés. C’est pour eux un grand désappointement de ne pas les voir s’extasier au moindre fait ayant quelque teinte de surnaturel, et de les trouver, à l’endroit de certains phénomènes, plus sceptiques que ceux qui ne connaissent pas le Spiritisme ; or, c’est précisément parce qu’ils le connaissent, qu’ils savent ce qui est possible et ce qui ne l’est pas, et qu’ils ne voient pas partout l’action des Esprits.

Dans le fait rapporté ci-dessus, il est assez curieux de voir la véritable cause révélée par une somnambule. C’est la consécration du phénomène de la lucidité. Quant à la jeune fille qui dit avoir agi sous l’impulsion d’un Esprit, il est certain que ce n’est pas la connaissance du Spiritisme qui lui a donné cette idée. D’où lui est-elle venue ? Il est très possible qu’elle se soit trouvée sous l’empire d’une obsession qu’on a prise, comme toujours, pour de la folie. Si cela est, ce n’est pas avec des remèdes qu’on la guérira. En pareil cas, on a maintes fois vu des personnes parler spontanément des Esprits, parce qu’elles les voient, et l’on dit alors qu’elles sont hallucinées.

Nous la supposons de bonne foi, parce que nous n’avons aucune raison de la suspecter ; mais il y a malheureusement des faits de nature à faire naître la défiance. Nous nous rappelons une femme qui a simulé la folie au sortir d’une réunion spirite où elle avait été admise sur ses instances, la seule à laquelle elle ait assisté ; conduite immédiatement dans une maison d’aliénés, elle a avoué depuis qu’elle avait reçu cinquante francs pour jouer cette comédie. [Voir : La guerre sourde] C’était à l’époque où l’on cherchait à accréditer l’idée que les maisons de fous regorgeaient de Spirites. Cette femme s’est laissé séduire par l’appât de quelque argent, d’autres peuvent céder à d’autres influences. Nous ne prétendons pas qu’il en soit ainsi de la jeune fille ; nous avons simplement voulu montrer que lorsqu’on veut dénigrer une chose, tous les moyens sont bons ; c’est, pour les Spirites, une raison de plus d’être sur leurs gardes et de tout observer scrupuleusement. Du reste, si tout ce qui se trame par-dessous main prouve que la lutte n’est pas finie, et qu’il faut redoubler de vigilance et de fermeté, c’est également la preuve que tout le monde ne regarde pas le Spiritisme comme une chimère.

A coté de la guerre sourde, il y a la guerre à ciel ouvert, plus généralement faite par l’incrédulité railleuse ; celle-ci s’est évidemment modifiée. Les faits qui se multiplient, l’adhésion de personnes dont on ne peut suspecter la bonne foi ni la raison, l’impassibilité des Spirites, leur calme et leur modération en présence des orages qu’on a soulevés contre eux, ont donné à réfléchir. La presse enregistre chaque jour des faits spirites ; si, dans le nombre, il y en a de vrais, d’autres sont évidemment inventés pour les besoins de la cause de l’opposition. On ne nie plus les phénomènes, mais on cherche à les rendre ridicules par l’exagération. C’est une tactique assez inoffensive, car il n’est pas difficile aujourd’hui de faire, en ces matières, la part de l’invraisemblance. Les journaux d’Amérique ne sont pas en reste d’inventions sous ce rapport, et les nôtres s’empressent de les répéter. C’est ainsi que la plupart ont reproduit l’histoire suivante dans le courant de mars dernier :


3. —  ETATS-UNIS. — On a exécuté à Cleveland  †  (Ohio) un homme, le docteur Hughes, qui, au moment de mourir, a fait un discours attestant un esprit d’une fermeté et d’une lucidité extraordinaires. Il a profité de l’occasion pour faire sur l’utilité et la justice de la peine de mort une dissertation qui n’a pas duré moins d’une demi-heure. Cette pénalité de la mort, a-t-il dit, est tout simplement ridicule. Quel avantage y a-t-il à prendre ma vie ? Aucun. Ce n’est certainement pas mon exemple qui en détournera d’autres du crime. Est-ce que je me souviens d’avoir tiré ce coup de pistolet ? Du tout, je n’en ai pas, même aujourd’hui, le moindre souvenir. Je puis admettre que la loi de l’Ohio  †  me frappe justement, mais je dis en même temps qu’elle est folle et vaine.

« Si vous prétendez que, parce que cette corde va être nouée autour de mon cou, et serrée jusqu’à ce que mort s’ensuive, elle aura pour effet de prévenir l’assassinat, je dis que votre pensée est folle et vaine ; car, dans la situation d’esprit où était John W. Hughes quand il a assassiné, il n’y a pas d’exemple sur la terre qui eût pu empêcher un homme, quel qu’il fût, de faire ce que j’ai fait. Je m’incline devant la loi du pays avec la pensée que c’est un meurtre inutile autant que cruel de prendre ma vie. J’espère que mon supplice ne restera pas comme un exemple de la peine de mort, mais comme un argument qui en prouve l’inanité.

« Hughes a ensuite fait un examen de conscience, et s’est longuement étendu sur la religion et sur l’immortalité de l’âme. Ses doctrines en ces graves matières ne sont pas positivement orthodoxes ; mais elles attestent au moins un sang-froid singulier. Il a aussi parlé du Spiritualisme ou plutôt du Spiritisme. « Je sais, a-t-il dit, par ma propre expérience, qu’il y a entre ceux qui sortent de la vie et ceux qui restent des communications incessantes. Je vais aujourd’hui souffrir la suprême pénalité légale, mais en même temps je suis sûr que je serai avec vous après mon exécution comme j’y suis maintenant.

« Mes juges et mes bourreaux me verront toujours devant leurs yeux, et vous-mêmes qui êtes venus ici pour me voir mourir, il n’en est pas un de vous qui ne me revoie en chair et en os, vêtu de noir comme je le suis, portant mon propre deuil prématuré, pendant son sommeil comme pendant les heures de ses occupations journalières. — Adieu, messieurs, j’espère qu’aucun de vous ne fera ce que j’ai fait ; mais s’il en est quelqu’un qui se trouve dans l’état mental où j’étais moi-même quand j’ai commis le crime, ce n’est assurément pas le souvenir de cette journée qui l’en empêchera. Adieu. »

« Après cette harangue, la trappe est tombée, et le docteur Hughes est resté pendu. Mais ses paroles avaient produit une profonde impression sur son auditoire, et il en est résulté de singuliers effets. Voici ce que nous trouvons aujourd’hui à ce sujet dans le Herald de Cleveland :

« Le docteur Hughes, étant sur l’échafaud avec la corde au cou, a dit qu’il serait avec ceux qui l’entendaient aussi bien après qu’avant sa mort, et on dirait qu’il a pris à cœur de tenir sa parole. Parmi les personnes qui l’avaient visité dans sa cellule avant l’exécution, se trouvait un honnête boucher allemand. Cet homme, depuis son entrevue avec le condamné, n’a plus que le docteur Hughes dans la cervelle. Il a sans cesse devant les yeux, la nuit, le jour, à toute heure, des prisons, des gibets, des hommes pendus. Il ne dort plus, ne mange plus, n’a plus la tête à sa famille ni à ses affaires, et hier soir cette vision a failli le tuer.

« Il venait d’entrer dans son écurie pour soigner les bestiaux, lorsqu’il vit debout, près de son cheval, le docteur Hughes, vêtu de ses mêmes habits noirs qu’il portait avant de quitter notre planète, et paraissant jouir d’une excellente santé. Le pauvre boucher jeta un cri perçant, un hurlement de l’autre monde, et tomba à la renverse.

« On accourut, on le releva ; son œil était hagard, sa face livide, ses lèvres tremblantes, et d’une voix pantelante, il demanda, dès qu’il reprit connaissance, si le docteur Hughes était encore là. Il venait de le voir, disait-il, et, s’il n’était plus dans l’écurie, il ne pouvait être loin. Ce fut avec toutes les peines du monde qu’on le calma et qu’on l’entraîna dans sa maison. La vision le poursuit toujours, et aux dernières nouvelles encore, il était dans un état d’agitation que rien ne pouvait apaiser.

« Mais voici qui est plus curieux encore. Le boucher n’est pas le seul à qui le docteur Hughes ait apparu depuis sa mort. Le surlendemain de l’exécution, tous les détenus l’ont vu, de leurs yeux vu, entrer dans la prison et parcourir les corridors. Il avait l’air parfaitement naturel : il était habillé de noir comme sur l’échafaud ; il passait souvent sa main autour de son cou, et en même temps laissait échapper de sa bouche un son guttural qui sifflait entre ses dents. Il a monté les escaliers qui conduisent à sa cellule, y est entré, s’est assis, et s’est mis à écrire des vers. Voilà ce qu’ont raconté les détenus, et rien au monde ne leur aurait persuadé qu’ils avaient été le jouet d’une illusion. »

Ce fait ne laisse pas d’avoir son côté instructif par les paroles du patient ; il est vrai quant au sujet principal ; mais comme celui-ci a cru devoir, dans sa dernière allocution, parler du Spiritualisme ou Spiritisme, le narrateur a trouvé bon d’enrichir son récit d’apparitions, qui n’ont existé qu’au bout de sa plume, sauf la première, celle au boucher, qui paraît être réelle.


4. Tom l’aveugle n’est pas un conte de revenant, mais un phénomène d’intelligence inouï. Tom est un jeune nègre de dix-sept ans, aveugle de naissance, soi-disant doué d’un instinct musical merveilleux. Le Harpers Weekly, journal illustré de New-York,  †  lui consacre un long article dont nous extrayons les passages suivants :

« Il n’avait pas deux ans qu’il traduisait par le chant tout ce qui frappait son oreille, et telle était la justesse et la facilité avec lesquelles il saisissait un motif, qu’en entendant les premières notes d’un chant il pouvait exécuter sa partie. Bientôt il commença à accompagner en faisant les seconds, bien qu’il n’en eût jamais entendu, mais un instinct de nature lui révélait que quelque chose de semblable devait se chanter.

« A l’âge de quatre ans il entendit pour la première fois un piano. A l’arrivée de l’instrument, il était, selon son habitude, à s’amuser dans la cour ; la première vibration des touches l’attira au parloir (le salon). On lui permit de promener ses doigts sur les touches simplement pour satisfaire sa curiosité, et ne pas lui refuser l’inno-cent plaisir de faire un peu de bruit. Une fois, de minuit au jour, il put rester au parloir où il avait su pénétrer. Le piano n’avait pas été fermé, et les jeunes demoiselles de la maison furent réveillées par les sons de l’instrument. A leur grand étonnement, elles entendirent Tom jouant un de leurs morceaux, et le matin elles le trouvèrent encore au piano. On lui permit alors de jouer autant qu’il lui plairait ; il fit des progrès si rapides et si étonnants que le piano devint l’écho de tout ce qu’il entendit. Il développa ainsi de nouvelles et prodigieuses facultés, inconnues jusqu’alors au monde musical, et dont il semble que Dieu ait réservé le monopole à Tom. Il avait moins de cinq ans lorsque, après un orage, il en fit un qu’il intitula : Ce que me disent le vent, le tonnerre et la pluie.

« Soixante-dix professeurs de musique, à Philadelphie, ont spontanément revêtu de leur signature une déclaration qui se termine ainsi : « En fait, sous toute forme d’examen musical, exécution, composition et improvisation, il a montré une puissance et une capacité qui le classent parmi les plus étonnants phénomènes dont l’histoire de la musique ait gardé le souvenir. Les soussignés pensent qu’il est impossible d’expliquer ces prodigieux résultats par aucune des hypothèses que peuvent fournir les lois de l’art ou de la science.

« Aujourd’hui il joue la plus difficile musique des grands auteurs avec une délicatesse de touche, une puissance et une expression qui ont été rarement entendues. C’est au printemps prochain qu’il doit se rendre en Europe. »


Voici l’explication donnée à ce sujet par l’intermédiaire de M. Morin, médium, dans une réunion spirite de Paris,  †  chez la princesse O… le 13 mars 1866, et à laquelle nous assistions. Elle peut servir de guide dans tous les cas analogues.

« Ne vous hâtez pas trop de croire à la venue du fameux musicien noir aveugle ; ses aptitudes musicales sont trop exaltées par les grands colporteurs de nouvelles, qui ne sont pas avares de faits imaginaires destinés à satisfaire la curiosité des abonnés. Il faut vous défier beaucoup des reproductions, et surtout des emprunts réels ou supposés que font vos journalistes à leurs confrères d’outre-mer. Bien des ballons d’essai sont lancés dans le but de faire tomber les Spirites dans le panneau, et l’espoir d’entraîner le Spiritisme et ses adeptes dans le domaine du ridicule. Tenez-vous donc sur vos gardes, et ne commentez jamais un fait sans, au préalable, vous être bien renseignés, et sans avoir demandé l’opinion de vos guides.

« Vous ne pouvez vous imaginer toutes les ruses employées par les grands pourfendeurs des idées nouvelles, pour arriver à surprendre une bévue, une faute, une absurdité palpable, commise par les Esprits ou leurs trop confiants prosélytes. De tous côtés les pièges à Spirites sont tendus ; tous les jours on y apporte des perfectionnements ; petits et grands sont à l’affût, et le jour où ils pourraient prendre le chef en défaut, les mains dans le sac au ridicule, serait le plus beau de leur vie. Ils ont une telle confiance en eux, qu’ils s’en réjouissent par anticipation ; mais il est un vieux proverbe qui dit : « Il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué ; » or, le Spiritisme, leur bête noire, est encore debout, et pourrait bien leur faire user leurs chaussures avant de se laisser atteindre. C’est la tête basse qu’ils viendront un jour brûler l’encens devant l’autel de la vérité qui, dans un temps prochain, sera reconnue par tout le monde.

« En vous conseillant de vous tenir sur la réserve, je ne prétends pas que les faits et gestes attribués à cet aveugle soient impossibles, mais il ne faut pas croire à celui-ci avant de l’avoir vu, et surtout entendu. »


Ebelmann.


Un tel prodige, même en faisant une large part à l’exagération, serait le plus éloquent plaidoyer en faveur de la réhabilitation de la race nègre, dans un pays où le préjugé de la couleur est si enraciné ; et s’il ne peut être expliqué par les lois connues de la science, il le serait de la manière la plus claire et la plus rationnelle par celle de la réincarnation, non d’un noir dans un noir, mais d’un blanc dans un noir n car une faculté instinctive si précoce ne pourrait être que le souvenir intuitif de connaissances acquises dans une existence antérieure.

Mais alors, dira-t-on, ce serait une déchéance de l’Esprit de passer de la race blanche dans la race nègre ? Déchéance de position sociale, sans doute, ce qui se voit tous les jours, quand, de riche on renaît pauvre, ou de maître serviteur, mais non rétrogradation de l’Esprit, puisqu’il aurait conservé ses aptitudes et son acquis. Cette position serait pour lui une épreuve ou une expiation ; peut-être aussi une mission, afin de prouver que cette race n’est pas vouée par la nature à une infériorité absolue. Nous raisonnons ici dans l’hypothèse de la réalité du fait, et pour les cas analogues qui pourraient se présenter.


5. — Les deux faits suivants sont de même fabrique, et n’ont pas besoin d’autre commentaire que ce qui vient d’être dit. Le premier, rapporté par le Soleil du 19 juillet, est censé d’origine américaine ; le second, tiré de l’Evènement du mois d’avril, est du cru parisien. Ce sont incontestablement les Spirites qui se montreront les incrédules les plus endurcis ; quant aux autres, la curiosité pourrait bien en porter plus d’un à connaître la chose qu’on dit produire tant de merveilles.

« Les Esprits frappeurs et autres semblent élire domicile à Taunton,  †  et avoir choisi, pour théâtre de leurs exploits, la maison d’un malheureux docteur de cette ville. La cave, les corridors, les chambres, la cuisine et jusqu’au grenier du praticien sont hantés nuitamment par les ombres de tous ceux qu’il a envoyés dans un monde meilleur. Ce sont des cris, des plaintes, des imprécations, des ironies sanglantes, selon l’esprit des ombres, qui n’ont quelquefois pas l’ombre d’esprit.

— Ta dernière potion m’a tué, dit une voix caverneuse.

— Allopathe, s’écrie une voix plus jeune, tu ne vaux même pas un homéopathe.

— Je suis ta deux cent quatre-vingt-dix-neuvième victime, la dernière de toutes, psalmodie une autre apparition. Tâche au moins de faire une croix quand tu seras à la trois centième.

« Et ainsi de suite. La vie de l’infortuné docteur n’est plus soutenable. »


L’autre anecdote est aussi spirituelle :

« C’est dimanche soir, pendant cet orage épouvantable dont les journaux d’hier ont énuméré les ravages. Une calèche descendait à travers la pluie et les éclairs l’avenue de Neuilly ; dedans, se trouvaient quatre personnes ; elles avaient dîné ensemble dans une très aimable et très hospitalière maison, près du parc de Neuilly, et égayés par cette soirée agréable, les quatre voyageurs, insoucieux de l’orage, se livraient à une causerie un peu légère.

« On parlait des femmes, on en médisait, on les calomniait même quelque peu. Le nom d’une jeune personne fut mis sur le tapis, et quelqu’un émit des doutes sur la nationalité de la victime, insinuant qu’assurément ce n’est pas à Nanterre  †  qu’elle a vu le jour.

« Tout à coup, un coup de tonnerre fait frissonner les portières, un éclair illumine toute la voiture et la pluie fouette les vitres à les briser. A la lueur de la foudre, les quatre voyageurs virent alors, debout, devant eux, dans la voiture, un cinquième voyageur, ou plutôt une voyageuse — c’était une femme, vêtue de blanc, un spectre, un ange. L’apparition s’évanouit avec l’éclair, puis comme si le fantôme eût voulu protester contre la calomnie qu’on dirigeait contre la jeune personne absente, une pluie de fleurs d’oranger tomba sur les quatre compagnons de route et les couvrit d’une neige embaumée.

« Il y avait, à la vérité, un médium parmi les quatre voyageurs.

« Rien ne vous force d’ajouter foi à cette histoire invraisemblable, et je n’en crois pas, pour ma part, un traître mot. C’est un des quatre voyageurs qui me la raconte et me l’affirme. Elle m’a paru originale, voilà tout ! »



[1] [Voir remarque du compilateur.]


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