Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année I — Février 1858.

(Langue portugaise)

M. HOME.

1. — Les phénomènes opérés par M. Home ont produit d’autant plus de sensation, qu’ils sont venus confirmer les récits merveilleux apportés d’outre-mer, et à la véracité desquels s’attachait une certaine défiance. Il nous a montré que, tout en faisant la part la plus large possible à l’exagération, il en restait assez pour attester la réalité de faits s’accomplissant en dehors de toutes les lois connues.

On a parlé de M. Home en sens très divers, et nous avouons qu’il s’en faut de beaucoup que tout le monde lui ait été sympathique, les uns par esprit de système, les autres par ignorance. Nous voulons bien admettre chez ces derniers une opinion consciencieuse, faute d’avoir pu constater les faits par eux-mêmes ; mais si, dans ce cas, le doute est permis, une hostilité systématique et passionnée est toujours déplacée. En tout état de cause, juger ce que l’on ne connaît pas est un manque de logique, le décrier sans preuves est un oubli des convenances. Faisons, pour un instant, abstraction de l’intervention des Esprits, et ne voyons dans les faits rapportés que de simples phénomènes physiques. Plus ces faits sont étranges, plus ils méritent d’attention. Expliquez-les comme vous voudrez, mais ne les contestez pas a priori, si vous ne voulez pas faire douter de votre jugement. Ce qui doit étonner, et ce qui nous paraît plus anormal encore que les phénomènes en question, c’est de voir ceux mêmes qui déblatèrent sans cesse contre l’opposition de certains corps savants à l’endroit des idées nouvelles, qui leur jettent sans cesse à la face, et cela dans les termes les moins mesurés, les déboires essuyés par les auteurs des découvertes les plus importantes, qui citent, à tout propos, et Fulton, et Jenner, et Galilée, tomber eux-mêmes dans un travers semblable, eux qui disent, avec raison, qu’il y a peu d’années encore, quiconque eût parlé de correspondre en quelques secondes d’un bout du monde à l’autre, eût passé pour un insensé. S’ils croient au progrès dont ils se disent les apôtres, qu’ils soient donc conséquents avec eux-mêmes et ne s’attirent pas le reproche qu’ils adressent aux autres de nier ce qu’ils ne comprennent pas.

Revenons à M. Home. Venu à Paris  †  au mois d’octobre 1855, il s’est trouvé dès le début lancé dans le monde le plus élevé, circonstance qui eût dû imposer plus de circonspection dans le jugement porté sur lui, car plus ce monde est élevé et éclairé, moins il est suspect de s’être bénévolement laissé jouer par un aventurier. Cette position même a suscité des commentaires. On se demande ce qu’est M. Home. Pour vivre dans ce monde, pour faire des voyages coûteux, il faut, dit-on, qu’il ait de la fortune. S’il n’en a pas, il faut qu’il soit soutenu par des personnes puissantes. On a bâti sur ce thème mille suppositions plus ridicules les unes que les autres. Que n’a-t-on pas dit aussi de sa sœur qu’il est allé chercher il y a un an environ ; c’était, disait-on, un médium plus puissant que lui-même ; à eux deux ils devaient accomplir des prodiges à faire pâlir ceux de Moïse. Plus d’une fois des questions nous ont été adressées à ce sujet ; voici notre réponse.

M. Home, en venant en France, ne s’est point adressé au public ; il n’aime ni ne recherche la publicité. S’il fût venu dans un but de spéculation, il eût couru le pays en appelant la réclame à son aide ; il eût cherché toutes les occasions de se produire, tandis qu’il les évite ; il eût mis un prix à ses manifestations, tandis qu’il ne demande rien à personne. Malgré sa réputation, M. Home n’est donc point ce qu’on peut appeler un homme public, sa vie privée n’appartient qu’à lui seul. Du moment qu’il ne demande rien, nul n’a le droit de s’enquérir comment il vit sans commettre une indiscrétion. Est-il soutenu par des gens puissants ? cela ne nous regarde pas ; tout ce que nous pouvons dire, c’est que dans cette société d’élite il a conquis des sympathies réelles et s’est fait des amis dévoués, tandis que d’un faiseur de tours on s’en amuse, on le paie et tout est dit. Nous ne voyons donc en M. Home qu’une chose : un homme doué d’une faculté remarquable. L’étude de cette faculté est tout ce qui nous intéresse, et tout ce qui doit intéresser quiconque n’est pas mû par le seul sentiment de la curiosité. L’histoire n’a point encore ouvert sur lui le livre de ses secrets ; jusque-là il n’appartient qu’à la science. Quant à sa sœur, voici la vérité : C’est une enfant de onze ans, qu’il a amenée à Paris pour son éducation dont s’est chargée une illustre personne. Elle sait à peine en quoi consiste la faculté de son frère. C’est bien simple, comme on le voit, bien prosaïque pour les amateurs du merveilleux.

Maintenant, pourquoi M. Home est-il venu en France ? Ce n’est point pour chercher fortune, nous venons de le prouver. Est-ce pour connaître le pays ? Il ne le parcourt pas ; il sort peu, et n’a nullement les habitudes d’un touriste. Le motif patent a été le conseil des médecins qui ont cru l’air d’Europe nécessaire à sa santé, mais les faits les plus naturels sont souvent providentiels. Nous pensons donc que, s’il y est venu, c’est qu’il devait y venir. La France, encore dans le doute en ce qui concerne les manifestations spirites, avait besoin qu’un grand coup fût frappé ; c’est M. Home qui a reçu cette mission, et plus le coup a frappé haut, plus il a eu de retentissement. La position, le crédit, les lumières de ceux qui l’ont accueilli, et qui ont été convaincus par l’évidence des faits, ont ébranlé les convictions d’une foule de gens, même parmi ceux qui n’ont pu être témoins oculaires. La présence de M. Home aura donc été un puissant auxiliaire pour la propagation des idées spirites ; s’il n’a pas convaincu tout le monde, il a jeté des semences qui fructifieront d’autant plus que les médiums eux-mêmes se multiplieront. Cette faculté, comme nous l’avons dit ailleurs, n’est point un privilège exclusif ; elle existe à l’état latent et à divers degrés chez une foule d’individus, n’attendant qu’une occasion pour se développer ; le principe est en nous par l’effet même de notre organisation ; il est dans la nature ; tous nous en avons le germe, et le jour n’est pas éloigné où nous verrons les médiums surgir sur tous les points, au milieu de nous, dans nos familles, chez le pauvre comme chez le riche, afin que la vérité soit connue de tous, car selon ce qui nous est annoncé, c’est une ère nouvelle, une nouvelle phase qui commence pour l’humanité. L’évidence et la vulgarisation des phénomènes spirites donneront un nouveau cours aux idées morales, comme la vapeur a donné un nouveau cours à l’industrie.

Si la vie privée de M. Home doit être fermée aux investigations d’une indiscrète curiosité, il est certains détails qui peuvent à juste titre intéresser le public et qu’il est même inutile de connaître pour l’appréciation des faits.

M. Daniel Dunglas Home est né le 15 mars 1833 près d’Edimbourg.  †  Il a donc aujourd’hui 24 ans. Il descend de l’ancienne et noble famille des Dunglas d’Ecosse, jadis souveraine. C’est un jeune homme d’une taille moyenne, blond, dont la physionomie mélancolique n’a rien d’excentrique ; il est d’une complexion très délicate, de mœurs simples et douces, d’un caractère affable et bienveillant sur lequel le contact des grandeurs n’a jeté ni morgue ni ostentation. Doué d’une excessive modestie, jamais il ne fait parade de sa merveilleuse faculté, jamais il ne parle de lui-même, et si, dans l’expansion de l’intimité, il raconte les choses qui lui sont personnelles, c’est avec simplicité, et jamais avec l’emphase propre aux gens avec lesquels la malveillance cherche à le comparer. Plusieurs faits intimes, qui sont à notre connaissance personnelle, prouvent chez lui de nobles sentiments et une grande élévation d’âme ; nous le constatons avec d’autant plus de plaisir que l’on connaît l’influence des dispositions morales sur la nature des manifestations.

Les phénomènes dont M. Home est l’instrument involontaire ont parfois été racontés par des amis trop zélés avec un enthousiasme exagéré dont s’est emparée la malveillance. Tels qu’ils sont, ils ne sauraient avoir besoin d’une amplification plus nuisible qu’utile à la cause. Notre but étant l’étude sérieuse de tout ce qui se rattache à la science spirite, nous nous renfermerons dans la stricte réalité des faits constatés par nous-même ou par les témoins oculaires les plus dignes de foi. Nous pourrons donc les commenter avec la certitude de ne pas raisonner sur des choses fantastiques.

M. Home est un médium du genre de ceux qui produisent des manifestations ostensibles, sans exclure pour cela les communications intelligentes ; mais ses prédispositions naturelles lui donnent pour les premières une aptitude plus spéciale. Sous son influence, les bruits les plus étranges se font entendre, l’air s’agite, les corps solides se meuvent, se soulèvent, se transportent d’un endroit à l’autre à travers l’espace, des instruments de musique font entendre des sons mélodieux, des êtres du monde extra-corporel apparaissent, parlent, écrivent et souvent vous étreignent jusqu’à la douleur. Lui-même plusieurs fois s’est vu, en présence de témoins oculaires, enlevé sans soutien à plusieurs mètres de hauteur.

De ce qui nous a été enseigné sur le rang des Esprits qui produisent en général ces sortes de manifestations, il ne faudrait pas en conclure que M. Home n’est en rapport qu’avec la classe infime du monde spirite. Son caractère et les qualités morales qui le distinguent doivent au contraire lui concilier la sympathie des Esprits supérieurs ; il n’est, pour ces derniers, qu’un instrument destiné à dessiller les yeux des aveugles par des moyens énergiques, sans être pour cela privé des communications d’un ordre plus élevé. C’est une mission qu’il a acceptée ; mission qui n’est exempte ni de tribulations, ni de dangers, mais qu’il accomplit avec résignation et persévérance, sous l’égide de l’Esprit de sa mère, son véritable ange gardien.

La cause des manifestations de M. Home est innée en lui ; son âme, qui semble ne tenir au corps que par de faibles liens, a plus d’affinité pour le monde spirite que pour le monde corporel ; c’est pourquoi elle se dégage sans efforts, et entre plus facilement que chez d’autres en communication avec les êtres invisibles. Cette faculté s’est révélée en lui dès la plus tendre enfance. A l’âge de six mois, son berceau se balançait tout seul en l’absence de sa nourrice et changeait de place. Dans ses premières années il était si débile qu’il pouvait à peine se soutenir ; assis sur un tapis, les jouets qu’il ne pouvait atteindre venaient d’eux-mêmes se mettre à sa portée. A trois ans il eut ses premières visions, mais il n’en a pas conservé le souvenir. Il avait neuf ans lorsque sa famille alla se fixer aux États-Unis ; là, les mêmes phénomènes continuèrent avec une intensité croissante à mesure qu’il avançait en âge, mais sa réputation comme médium ne s’établit qu’en 1850, vers l’époque où les manifestations spirites commencèrent à devenir populaires dans ce pays. En 1854 il vint en Italie, nous l’avons dit, pour sa santé ; il étonna Florence  †  et Rome  †  par de véritables prodiges. Converti à la foi catholique dans cette dernière ville, il dut prendre l’engagement de rompre ses relations avec le monde des Esprits. Pendant un an, en effet, son pouvoir occulte sembla l’avoir abandonné ; mais comme ce pouvoir est au-dessus de sa volonté, au bout de ce temps, ainsi que le lui avait annoncé l’Esprit de sa mère, les manifestations se reproduisirent avec une nouvelle énergie. Sa mission était tracée ; il devait marquer parmi ceux que la Providence a choisis pour nous révéler par des signes patents la puissance qui domine toutes les grandeurs humaines.

Si M. Home n’était, comme le prétendent certaines personnes qui jugent sans avoir vu, qu’un habile prestidigitateur, il aurait toujours, sans aucun doute, à sa disposition des tours dans sa gibecière, tandis qu’il n’est pas le maître de les produire à volonté. Il lui serait donc impossible d’avoir des séances régulières, car ce serait souvent au moment où il en aurait besoin que sa faculté lui ferait défaut. Les phénomènes se manifestent quelquefois spontanément au moment où il s’y attend le moins, tandis que dans d’autres il est impuissant à les provoquer, circonstance peu favorable à quiconque voudrait faire des exhibitions à heures fixes. Le fait suivant pris entre mille en est la preuve. Depuis plus de quinze jours M. Home n’avait pu obtenir aucune manifestation, lorsque, se trouvant à déjeuner chez un de ses amis avec deux ou trois autres personnes de sa connaissance, des coups se firent soudain entendre dans les murs, les meubles et le plafond. Il paraît, dit-il, que les voilà qui reviennent. M. Home était à ce moment assis sur le canapé avec un ami. Un domestique apporte le plateau à thé et s’apprête à le déposer sur la table placée au milieu du salon ; celle-ci, quoique fort lourde, se soulève subitement en se détachant du sol de 20 à 30 centimètres de hauteur, comme si elle eût été attirée par le plateau ; le domestique effrayé le laisse échapper, et la table d’un bond s’élance vers le canapé et vient retomber devant M. Home et son ami, sans que rien de ce qui était dessus fût dérangé. Ce fait n’est point sans contredit le plus curieux de ceux que nous aurons à rapporter, mais il présente cette particularité digne de remarque, qu’il s’est produit spontanément, sans provocation, dans un cercle intime, dont aucun des assistants, cent fois témoins de faits semblables, n’avait besoin de nouveaux témoignages ; et assurément ce n’était pas le cas pour M. Home de montrer son savoir-faire, si savoir-faire il y a.

Dans un prochain article nous citerons d’autres manifestations. [Le suivant.]


[Revue de mars 1858.]

HOME.

(Deuxième article. — Voir le numéro de février 1858.)

2. — M. Home, ainsi que nous l’avons dit, est un médium du genre de ceux sous l’influence desquels se produisent plus spécialement des phénomènes physiques, sans exclure pour cela les manifestations intelligentes. Tout effet qui révèle l’action d’une volonté libre est par cela même intelligent ; c’est-à-dire qu’il n’est pas purement mécanique et qu’il ne saurait être attribué à un agent exclusivement matériel ; mais de là aux communications instructives d’une haute portée morale et philosophique, il y a une grande distance, et il n’est pas à notre connaissance que M. Home en obtienne de cette nature. N’étant pas médium écrivain, la plupart des réponses sont données par des coups frappés indiquant les lettres de l’alphabet, moyen toujours imparfait et trop lent, qui se prête difficilement à des développements d’une certaine étendue. Il obtient pourtant aussi l’écriture, mais par un autre moyen dont nous parlerons tout à l’heure.

Disons d’abord, comme principe général, que les manifestations ostensibles, celles qui frappent nos sens, peuvent être spontanées ou provoquées. Les premières sont indépendantes de la volonté ; elles ont même souvent lieu contre la volonté de celui qui en est l’objet, et auquel elles ne sont pas toujours agréables. Les faits de ce genre sont fréquents, et, sans remonter aux récits plus ou moins authentiques des temps reculés, l’histoire contemporaine nous en offre de nombreux exemples dont la cause, ignorée dans le principe, est aujourd’hui parfaitement connue : tels sont, par exemple, les bruits insolites, le mouvement désordonné des objets, les rideaux tirés, les couvertures arrachées, certaines apparitions, etc. Quelques personnes sont douées d’une faculté spéciale qui leur donne le pouvoir de provoquer ces phénomènes, au moins en partie, pour ainsi dire à volonté. Cette faculté n’est point très rare, et, sur cent personnes, cinquante au moins la possèdent à un degré plus ou moins grand. Ce qui distingue M. Home, c’est qu’elle est développée en lui, comme chez les médiums de sa force, d’une manière pour ainsi dire exceptionnelle. Tel n’obtiendra que des coups légers, ou le déplacement insignifiant d’une table, alors que sous l’influence de M. Home les bruits les plus retentissants se font entendre, et tout le mobilier d’une chambre peut être bouleversé, les meubles montant les uns sur les autres. Quelque étranges que soient ces phénomènes, l’enthousiasme de quelques admirateurs trop zélés a encore trouvé moyen de les amplifier par des faits de pure invention. D’un autre côté, les détracteurs ne sont pas restés inactifs ; ils ont raconté sur lui toutes sortes d’anecdotes qui n’ont existé que dans leur imagination. En voici un exemple. M. le marquis de …, un des personnages qui ont porté le plus d’intérêt à M. Home, et chez lequel il était reçu dans l’intimité, se trouvait un jour à l’Opéra avec ce dernier. A l’orchestre était M. de P…, un de nos abonnés, qui les connaît personnellement l’un et l’autre. Son voisin lie conversation avec lui ; elle tombe sur M. Home. « Croiriez-vous, dit-il, que ce prétendu sorcier, ce charlatan, a trouvé moyen de s’introduire chez le marquis de… ; mais ses artifices ont été découverts, et il a été mis à la porte à coups de pieds comme un vil intrigant. — En êtes-vous bien sûr ? dit M. de P… et connaissez-vous M. le marquis de… ? -Certainement, reprend l’interlocuteur. — En ce cas, dit M. de P… regardez dans cette loge, vous pouvez le voir en compagnie de M. Home lui-même, auquel il n’a pas l’air de donner des coups de pied. » Là-dessus, notre malencontreux narrateur, ne jugeant pas à propos de poursuivre l’entretien, prit son chapeau et ne reparut plus. On peut juger par là de la valeur de certaines assertions. Assurément, si certains faits colportés par la malveillance étaient réels, ils lui auraient fait fermer plus d’une porte ; mais comme les maisons les plus honorables lui ont toujours été ouvertes, on doit en conclure qu’il s’est toujours et partout conduit en galant homme. Il suffit d’ailleurs d’avoir causé quelquefois avec M. Home, pour voir qu’avec sa timidité et la simplicité de son caractère, il serait le plus maladroit de tous les intrigants ; nous insistons sur ce point pour la moralité de la cause. Revenons à ses manifestations. Notre but étant de faire connaître la vérité dans l’intérêt de la science, tout ce que nous rapporterons est puisé à des sources tellement authentiques que nous pouvons en garantir la plus scrupuleuse exactitude ; nous le tenons de témoins oculaires trop graves, trop éclairés et trop haut placés pour que leur sincérité puisse être révoquée en doute. Si l’on disait que ces personnes ont pu, de bonne foi, être dupes d’une illusion, nous répondrions qu’il est des circonstances qui échappent à toute supposition de ce genre ; d’ailleurs ces personnes étaient trop intéressées à connaître la vérité pour ne pas se prémunir contre toute fausse apparence.

Home commence généralement ses séances par les faits connus : des coups frappés dans une table ou dans toute autre partie de l’appartement, en procédant comme nous l’avons dit ailleurs. Vient ensuite le mouvement de la table, qui s’opère d’abord par l’imposition des mains de lui seul ou de plusieurs personnes réunies, puis à distance et sans contact ; c’est une sorte de mise en train. Très souvent il n’obtient rien de plus ; cela dépend de la disposition où il se trouve et quelquefois aussi de celle des assistants ; il est telles personnes devant lesquelles il n’a jamais rien produit, fussent-elles de ses amis. Nous ne nous étendrons pas sur ces phénomènes aujourd’hui si connus et qui ne se distinguent que par leur rapidité et leur énergie. Souvent après plusieurs oscillations et balancements, la table se détache du sol, s’élève graduellement, lentement, par petites saccades, non plus de quelques centimètres, mais jusqu’au plafond, et hors de la portée des mains ; après être restée suspendue quelques secondes dans l’espace, elle descend comme elle était montée, lentement, graduellement.

La suspension d’un corps inerte, et d’une pesanteur spécifique incomparablement plus grande que celle de l’air, étant un fait acquis, on conçoit qu’il peut en être de même d’un corps animé. Nous n’avons pas appris que M. Home eût opéré sur aucune autre personne que sur lui-même, et encore ce fait ne s’est point produit à Paris,  †  mais il est avéré qu’il a eu lieu plusieurs fois tant à Florence  †  qu’en France, et notamment à Bordeaux,  †  en présence des témoins les plus respectables que nous pourrions citer au besoin. Il s’est, comme la table, élevé jusqu’au plafond, puis est redescendu de même. Ce qu’il y a de bizarre dans ce phénomène, c’est que, quand il se produit, ce n’est point par un acte de sa volonté, et il nous a dit lui-même qu’il ne s’en aperçoit pas et croit toujours être sur le sol, à moins qu’il ne regarde en bas ; les témoins seuls le voient s’enlever ; quant à lui, il éprouve à ce moment la sensation produite par le soulèvement d’un navire sur les vagues. Du reste, le fait que nous rapportons n’est point personnel à M. Home. L’histoire en cite plus d’un exemple authentique que nous relaterons ultérieurement.

De toutes les manifestations produites par M. Home, la plus extraordinaire est sans contredit celle des apparitions, c’est pourquoi nous y insisterons davantage, en raison des graves conséquences qui en découlent et de la lumière qu’elles jettent sur une foule d’autres faits. Il en est de même des sons produits dans l’air, des instruments de musique qui jouent seuls, etc. Nous examinerons ces phénomènes en détail dans notre prochain numéro.

M. Home, de retour d’un voyage en Hollande où il a produit à la cour et dans la haute société une profonde sensation, vient de partir pour l’Italie. Sa santé, gravement altérée, lui rendait nécessaire un climat plus doux.

Nous confirmons avec plaisir ce que certains journaux ont rapporté d’un legs de 6 000 fr. de rente qui lui a été fait par une dame anglaise convertie par lui à la doctrine spirite, et en reconnaissance de la satisfaction qu’elle en a éprouvée. M. Home méritait à tous égards cet honorable témoignage. Cet acte, de la part de la donatrice, est un précédent auquel applaudiront tous ceux qui partagent nos convictions ; espérons qu’un jour la doctrine aura son Mécène  †  : la postérité inscrira son nom parmi les bienfaiteurs de l’humanité. La religion nous enseigne l’existence de l’âme et son immortalité ; le Spiritisme nous en donne la preuve palpable et vivante, non plus par le raisonnement, mais par des faits. Le matérialisme est un des vices de la société actuelle, parce qu’il engendre l’égoïsme. Qu’y a-t-il, en effet, en dehors du moi pour quiconque rapporte tout à la matière et à la vie présente ? La doctrine spirite, intimement liée aux idées religieuses, en nous éclairant sur notre nature, nous montre le bonheur dans la pratique des vertus évangéliques ; elle rappelle l’homme à ses devoirs envers Dieu, la société et lui-même ; aider à sa propagation, c’est porter le coup mortel à la plaie du scepticisme qui nous envahit comme un mal contagieux ; honneur donc à ceux qui emploient à cette œuvre les biens dont Dieu les a favorisés sur la terre !


[Revue d’Avril 1858.]

HOME.

(Troisième article. — Voir les numéros de février et de mars 1858.)

3. — Il n’est pas à notre connaissance que M. Home ait fait apparaître, du moins visiblement pour tout le monde, d’autres parties du corps que des mains. On cite cependant un général mort en Crimée,  †  qui serait apparu à sa veuve et visible pour elle seule ; mais nous n’avons pas été à même de constater la réalité du fait, en ce qui concerne surtout l’intervention de M. Home dans cette circonstance. Nous nous bornons à ce que nous pouvons affirmer. Pourquoi des mains plutôt que des pieds ou une tête ? C’est ce que nous ignorons et ce qu’il ignore lui-même. Les Esprits interrogés à ce sujet ont répondu que d’autres médiums pourraient faire apparaître la totalité du corps ; du reste, ce n’est pas là le point le plus important ; si les mains seules apparaissent, les autres parties du corps n’en sont pas moins patentes, comme on le verra tout à l’heure.

L’apparition d’une main se manifeste généralement en premier lieu sous le tapis de la table, par les ondulations qu’elle produit en en parcourant toute la surface ; puis elle se montre sur le bord du tapis qu’elle soulève ; quelquefois elle vient se poser sur le tapis au milieu même de la table ; souvent elle saisit un objet qu’elle emporte dessous. Cette main, visible pour tout le monde, n’est ni vaporeuse ni translucide ; elle a la couleur et l’opacité naturelles ; au poignet, elle se termine par le vague. Si on la touche avec précaution, confiance et sans arrière-pensée hostile, elle offre la résistance, la solidité et l’impression d’une main vivante ; sa chaleur est douce, moite, et comparable à celle d’un pigeon tué depuis une demi-heure. Elle n’est point inerte, car elle agit, se prête aux mouvements qu’on lui imprime, ou résiste, vous caresse ou vous étreint. Si, au contraire, vous voulez la saisir brusquement et par surprise, vous ne touchez que le vide. Un témoin oculaire nous a raconté le fait suivant qui lui est personnel. Il tenait entre ses doigts une sonnette de table ; une main, d’abord invisible, puis après parfaitement apparente, vint la prendre en faisant des efforts pour la lui arracher ; n’y pouvant parvenir, elle passa par-dessus pour la faire glisser ; l’effort de traction était aussi sensible que si c’eût été une main humaine ; ayant voulu saisir vivement cette main, la sienne ne rencontra que l’air ; ayant écarté les doigts, la sonnette resta suspendue dans l’espace et vint lentement se poser sur le parquet.

Quelquefois il y a plusieurs mains. Le même témoin nous a rapporté le fait suivant. Plusieurs personnes étaient réunies autour d’une de ces tables de salle à manger qui se séparent en deux. Des coups sont frappés ; la table s’agite, s’ouvre d’elle-même, et, à travers la fente, apparaissent trois mains, l’une de grandeur naturelle, une autre très grande, et une troisième toute velue ; on les touche, on les palpe, elles vous serrent, puis s’évanouissent. Chez un de nos amis qui avait perdu un enfant en bas âge, c’est la main d’un enfant nouveau-né qui apparaît ; tout le monde peut la voir et la toucher ; cet enfant se pose sur sa mère, qui sent distinctement l’impression de tout le corps sur ses genoux.

Souvent la main vient se poser sur vous, vous la voyez, ou, si vous ne la voyez pas, vous sentez la pression des doigts ; quelquefois elle vous caresse, d’autres fois elle vous pince jusqu’à la douleur. M. Home, en présence de plusieurs personnes, se sentit ainsi saisir le poignet, et les assistants purent voir la peau tirée. Un instant après il se sentit mordre, et la trace de l’empreinte de deux dents fut visiblement marquée pendant plus d’une heure.

La main qui apparaît peut aussi écrire. Quelquefois elle se pose au milieu de la table, prend le crayon et trace des caractères sur le papier disposé à cet effet. Le plus souvent elle emporte le papier sous la table et le rapporte tout écrit. Si la main demeure invisible, l’écriture semble s’être produite toute seule. On obtient par ce moyen des réponses aux diverses questions que l’on peut adresser.

Un autre genre de manifestations non moins remarquable, mais qui s’explique par ce que nous venons de dire, est celui des instruments de musique jouant seuls. Ce sont ordinairement des pianos ou des accordéons. Dans cette circonstance, on voit distinctement les touches s’agiter et le soufflet se mouvoir. La main qui joue est tantôt visible, tantôt invisible ; l’air qui se fait entendre peut être un air connu exécuté sur la demande qui en est faite. Si l’artiste invisible est laissé à lui-même, il produit des accords harmonieux, dont l’ensemble rappelle la vague et suave mélodie de la harpe éolienne.  †  Chez un de nos abonnés où ces phénomènes se sont produits maintes fois, l’Esprit qui se manifestait ainsi était celui d’un jeune homme mort depuis quelque temps et ami de la famille, et qui de son vivant avait un remarquable talent comme musicien ; la nature des airs qu’il faisait entendre de préférence ne pouvait laisser aucun doute sur son identité pour les personnes qui l’avaient connu.

Le fait le plus extraordinaire dans ce genre de manifestations n’est pas, à notre avis, celui de l’apparition. Si cette apparition était toujours aériforme, elle s’accorderait avec la nature éthéréenne que nous attribuons aux Esprits ; or, rien ne s’opposerait à ce que cette matière éthérée devînt perceptible à la vue par une sorte de condensation, sans perdre sa propriété vaporeuse. Ce qu’il y a de plus étrange, c’est la solidification de cette même matière, assez résistante pour laisser une empreinte visible sur nos organes. Nous donnerons, dans notre prochain numéro, l’explication de ce singulier phénomène telle qu’elle résulte de l’enseignement même des Esprits [v. Théorie des manifestations physiques]. Aujourd’hui, nous nous bornerons à en déduire une conséquence relative au jeu spontané des instruments de musique. En effet, dès l’instant que la tangibilité temporaire de cette matière éthérée est un fait acquis, que dans cet état une main, apparente ou non, offre assez de résistance pour faire une pression sur les corps solides, il n’y a rien d’étonnant à ce qu’elle puisse exercer une pression suffisante pour faire mouvoir les touches d’un instrument. D’autre part, des faits non moins positifs prouvent que cette main appartient à un être intelligent ; rien d’étonnant non plus à ce que cette intelligence se manifeste par des sons musicaux, comme elle peut le faire par l’écriture ou le dessin. Une fois entré dans cet ordre d’idées, les coups frappés, le mouvement des objets et tous les phénomènes spirites de l’ordre matériel s’expliquent tout naturellement. [v. aussi : Calomnies contre M. Home et, Le faux Home.]



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